Lettre ouverte des représentants de l’opposition kazakhe au Président de la France François Hollande
© mukhtarablyazov.org 03.12.2014

Monsieur le Président,

Les 5 et 6 décembre prochains aura lieu votre visite au Kazakhstan, au cours de laquelle vous rencontrerez Monsieur Noursoultan Nazarbaïev.

Nous comprenons bien que les intérêts nationaux de la République Française et les intérêts politiques de l’Union Européenne vous dictent la nécessité de conduire des pourparlers avec les leaders des Etats, même si ce sont des dirigeants autoritaires voire des dictateurs notoires.

Noursoultan Nazarbaïev est justement un tel dictateur, qui gouverne notre pays depuis déjà 25 ans, c’est à dire depuis 1989. Nous ne savons pas si on vous a informé que le 1er décembre est un jour de fête nationale en République du Kazakhstan – on célèbre en effet la Journée du Premier Président. Par contre, vous savez certainement que votre homologue kazakh, conformément à la Constitution de ce pays, jouit du statut de « Leader de la Nation » et peut être élu au poste de président de l’Etat un nombre illimité de fois.

Les intérêts nationaux de la République Française vous dictent la nécessité d’entretenir de bonnes relations d’affaires et politiques avec les autorités officielles du Kazakhstan. Nous comprenons que dans les conditions du conflit politique très envenimé entre la Russie et l’Occident, le rôle du Kazakhstan se trouve renforcé du fait que les Etats occidentaux comptent sur la médiation de Noursoultan Nazarbaïev en ce qui concerne le règlement du conflit autour de l’Ukraine et dans le pays lui-même.

Cependant, nous devons vous décevoir – ces espoirs n’ont aucun fondement. Noursoultan Nazarbaïev a très peur de perdre son pouvoir et de ce fait il s’y accrochera jusqu’à son dernier souffle. Cela signifie, entre autres, qu’il continuera à agir au profit et dans l’intérêt de la force politique qu’il craint le plus. Et c’est la Russie et Vladimir Poutine qu’il redoute le plus.

Nous ne doutons pas que l’un des sujets abordés durant vos pourparlers avec NoursoultanNazarbaïev concerne l’affaire Moukhtar Abliazov. Celui-ci se trouve actuellement dans une prison française, et son extradition est revendiquée simultanément par la Russie et l’Ukraine. La raison pour laquelle ces deux pays, qui de fait se font la guerre, visent à atteindre le même but est simple – derrière les organes nationaux et de la Russie, et de l’Ukraine, se tiennent le Kazakhstan et Nazarbaïev.

Moukhtar Abliazov est entré dans la politique depuis la sphère du grand business, car il a réalisé que sans changements dans le système politique du Kazakhstan, ni le futur développement du pays, ni l’augmentation de la qualité et du niveau tant économique qu’existentiel du pays ne seraient possibles. C’est justement pour cela qu’en 2001, il a initié le mouvement civique « Choix Démocratique du Kazakhstan », dont il est devenu président avec Galymzhan Zhakiyanov en qualité de vice-président.

C’est justement pour cette activité, et non pour une fraude de biens et des dépassements de fonction, qu’en 2002 il a été arrêté et condamné à une peine de 6 ans de prison. Grâce à une campagne de grande envergure menée au Kazakhstan et à l’étranger, dans laquelle le Parlement Européen et les organes diplomatiques des pays occidentaux ont joué un rôle important, il a été remis en liberté au printemps 2003.

Après sa libération et la reprise de son activité dans le business, Moukhtar Abliazov n’a pas abandonné pour autant sa mission politique. En tant que partisan principal et persévérant sur la voie du développement démocratique de la République du Kazakhstan, il n’a pas seulement réussi à transformer la « Banque BTA » en la banque la plus importante de la Communauté des « Etats indépendants », mais il a aussi continué à soutenir, de toutes les façons possibles, le secteur nongouvernemental et les partis démocratiques. En tant que personnes qui dans cette période-là avaient le contact avec lui et ont collaboré avec lui, nous pouvons le confirmer publiquement.

A présent, Moukhtar Abliazov est accusé d’avoir pillé sa propre banque. Nous ne sommes pas d’accord avec une telle accusation du fait que nous connaissons le déroulement réel de ces événements ainsi que leur contexte. C’est justement son activité politique qui était le motif de la saisie par l’Etat de « la Banque BTA ». Pour cette raison, nous protestons contre la décision du tribunal français de le livrer à la Russie et l’Ukraine.

L’époque de Noursoultan Nazarbaïev s’achève et la République du Kazakhstan sera bientôt confronté au problème – quelle orientation choisir. Des personnes telles que Moukhtar Abliazov, justement, sont capables de conduire le pays vers la démocratie et vers la civilisation.

Quel est le sens, pour la République Française, d’aider Nazarbaïev, qui est prêt à tout pour tenir à nouveau son adversaire politique dans ses mains ?

Quel est le sens, pour la République Française, de soutenir le Kazakhstan, qui est aujourd’hui l’allié fidèle et déterminé de la Russie ?

Est-il approprié que vous, en tant que Chef de l’Etat Français, vous approuviez la demande de Noursoultan Nazarbaïev, qui redoute Vladimir Poutine beaucoup plus qu’il ne vous redoute, vous et les dirigeants des autres pays occidentaux ?

Monsieur le Président !

Nous comprenons que le poids de la responsabilité d’un pays et de son futur repose sur vos épaules. Cependant, nous demandons que vous vous rendiez compte du fait qu’entre vos mains se trouve peut-être l’avenir de la République du Kazakhstan.

Un pays ne peut pas aller de l’avant s’il est dépourvu de leaders. Nous espérons que le fait que Noursoultan Nazarbaïev abordera avec vous le sujet du sort de Moukhtar Abliazov en insistant pour qu’il soit livré, constituera une preuve qu’Abliazov est l’un des ces leaders. Nous avons l’espoir que les paroles – « Liberté, égalité, fraternité. » ne sont pas pour vous que des slogans vides de sens.

Veuillez agréer, Monsieur le Président, l’expression de nos sentiments respectueux,

Bulat Atabayev
Metteur en scène de théâtre, militant social, lauréat du Prix Goethe.
Il a été accusé d’avoir fomenté les événements de Zhanaozen et qui a été remis en liberté grâce à l’intervention des hommes politiques européens. Il a été forcé de fuir le Kazakhstan. A présent, il habite et travaille en Allemagne.

Muratbek Ketebayev
Président de la fondation « Activité civique ». Qui avec Vladimir Kozlov et Moukhtar Abliazov est accusé par les autorités kazakhes d’avoir organisé les émeutes tragiques de Zhanaozen le 16 décembre 2013 et qui, en décembre 2013, a obtenu le statut de réfugié politique en Pologne.

Irina Petrushova
Journaliste, rédactrice en chef du groupe de presse « Respublika » [« La République »]
Le journal kazakh « Golos Respubliki » [La Voix de la République »] faisant partie du groupe de presse a été interdit par les autorités en 2012 pour « extrémisme » après avoir couvert les événements de la grève d’ouvriers en décembre 2011 et la dispersion sanglante des émeutes de Zhanaozen.

Bakytzhan Teregozhina
Présidente de la fondation « Ar.Rukh.Khak ». Présidente du Comité soutenant les prisonniers politiques. 

Igor Vinyavskiy
Journaliste, rédacteur du journal indépendant interdit « Vzglyad ». Il a été accusé d’incitations au renversement du régime politique. Il a passé plus d’un mois en
prison. Il a été remis en liberté grâce à l’intervention d’hommes politiques européens en mars 2012 et a obtenu le droit d’asile en Pologne.

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